La
femme de l'aubergiste, reconnue pour être d'une curiosité
insatiable, fut la première à s'aventurer sur la grande
place du village. Certainement qu'elle devait avoir vu le vieil homme
sortir en catimini de l'Auberge un peu plus tôt. Elle regarda
d'un côté, puis de l'autre, espérant sûrement
ne pas être troublée alors qu'elle jetterait un coup
d'oeil dans la boîte. Se souvenant de ce qu'elle avait lu sur
l'affiche collée à la porte de l'Auberge, elle sourit.
Sachez que ce que vous découvrirez à l'intérieur vous appartiendra.
Justement,
elle rêvait de diamants ou d'une grosse somme d'argent qui lui
permettraient de quitter son mari et ce village qu'elle n'appréciait
guère... l'un comme l'autre. Elle souleva donc, sans plus
attendre, le couvercle. Ce qu'elle y découvrit
lui fit froncer les sourcils. À ses yeux, la boîte ne
contenait absolument
rien. Elle y glissa la main, fouillant chaque recoin, mais
rien n'y fit. Il n'y avait rien du tout. Bredouille, déçue
mais
aussi
plutôt fachée, elle s'en retourna à
ses chaudrons.
Du
haut de son observatoire, le vieil homme se senti triste. Il n'était
pas surpris par ce qu'il venait de voir, mais à chaque fois,
il en avait un pincement au coeur.
Et
il en fut ainsi toute la journée. Les habitants de ce village
très très lointain, parfois un à un, parfois par
petits groupes, se rendaient sur la grande place afin de retirer le
couvercle de la boîte-cadeau et de constater de leurs yeux, que
les dires de la femme de l'aubergiste étaient bien vrais: Soit
que la boîte était vide. Certains espéraient
qu'elle se soit trompée car tous rêvaient d'argent,
d'objets difficiles à obtenir dans ce lieu si isolé ou
de toute autre chose qui leur aurait faite grand plaisir. Mais
invariablement, pour chacun, la boîte demeurait vide. À
la fin de la journée, n'en pouvant plus de cette procession de
gens qui repartaient les mains vides, le vieil homme soupira
bruyamment. Et quand il fit trop noir pour y voir quoi que ce soit,
il se mit au lit, las de cette journée à pourtant ne
faire que le guet.
Cependant,
tout au long de la journée, le petit Sébastien avait
lui aussi surveillé la grande place du village. Son pupitre,
en classe, était un endroit privilégié du fait
que celui-ci lui permettait de très bien voir tout ce qui s'y
était passé durant le jour. Ce qui bien sûr, le
rendit très très curieux. Rien ne lui échappa.
Quand quelqu'un s'approchait de la boîte, il délaissait
sa lecture ou son crayon pour mettre toute son attention sur ce qui
allait se passer. Et même qu'il en oublia à quelques
reprises de respirer. Il remarqua donc tous ces gens qui regardaient
dans la boîte mais s'en jamais rien n'en ressortir. Lorsque
enfin la cloche
sonna la fin des cours, il se dirigea sans tarder vers la souche où
trônait
la boîte-cadeau. Mais même du haut de ses onze ans, il dû
admettre
qu'il n'était pas assez grand pour en atteindre le couvercle.
De toute façon, son enseignante, qui justement se hâtait
à regagner sa demeure, le houspilla de rentrer chez lui sans
tarder. Ce qu'il fit, sans rechigner, sachant qu'il n'avait cependant
pas dit son dernier mot.
***
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