cinq livres

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mercredi 10 décembre 2014

fable pour adultes / la boîte-cadeau / page # 4


      La femme de l'aubergiste, reconnue pour être d'une curiosité insatiable, fut la première à s'aventurer sur la grande place du village. Certainement qu'elle devait avoir vu le vieil homme sortir en catimini de l'Auberge un peu plus tôt. Elle regarda d'un côté, puis de l'autre, espérant sûrement ne pas être troublée alors qu'elle jetterait un coup d'oeil dans la boîte. Se souvenant de ce qu'elle avait lu sur l'affiche collée à la porte de l'Auberge, elle sourit.

    Sachez que ce que vous découvrirez à l'intérieur vous appartiendra.

  Justement, elle rêvait de diamants ou d'une grosse somme d'argent qui lui permettraient de quitter son mari et ce village qu'elle n'appréciait guère... l'un comme l'autre. Elle souleva donc, sans plus attendre, le couvercle. Ce qu'elle y découvrit lui fit froncer les sourcils. À ses yeux, la boîte ne contenait absolument rien. Elle y glissa la main, fouillant chaque recoin, mais rien n'y fit. Il n'y avait rien du tout. Bredouille, déçue mais
aussi plutôt fachée, elle s'en retourna à ses chaudrons.

      Du haut de son observatoire, le vieil homme se senti triste. Il n'était pas surpris par ce qu'il venait de voir, mais à chaque fois, il en avait un pincement au coeur.
      Et il en fut ainsi toute la journée. Les habitants de ce village très très lointain, parfois un à un, parfois par petits groupes, se rendaient sur la grande place afin de retirer le couvercle de la boîte-cadeau et de constater de leurs yeux, que les dires de la femme de l'aubergiste étaient bien vrais: Soit que la boîte était vide. Certains espéraient qu'elle se soit trompée car tous rêvaient d'argent, d'objets difficiles à obtenir dans ce lieu si isolé ou de toute autre chose qui leur aurait faite grand plaisir. Mais invariablement, pour chacun, la boîte demeurait vide. À la fin de la journée, n'en pouvant plus de cette procession de gens qui repartaient les mains vides, le vieil homme soupira bruyamment. Et quand il fit trop noir pour y voir quoi que ce soit, il se mit au lit, las de cette journée à pourtant ne faire que le guet.

      Cependant, tout au long de la journée, le petit Sébastien avait lui aussi surveillé la grande place du village. Son pupitre, en classe, était un endroit privilégié du fait que celui-ci lui permettait de très bien voir tout ce qui s'y était passé durant le jour. Ce qui bien sûr, le rendit très très curieux. Rien ne lui échappa. Quand quelqu'un s'approchait de la boîte, il délaissait sa lecture ou son crayon pour mettre toute son attention sur ce qui allait se passer. Et même qu'il en oublia à quelques reprises de respirer. Il remarqua donc tous ces gens qui regardaient dans la boîte mais s'en jamais rien n'en ressortir. Lorsque enfin la cloche sonna la fin des cours, il se dirigea sans tarder vers la souche où trônait la boîte-cadeau. Mais même du haut de ses onze ans, il dû admettre qu'il n'était pas assez grand pour en atteindre le couvercle. De toute façon, son enseignante, qui justement se hâtait à regagner sa demeure, le houspilla de rentrer chez lui sans tarder. Ce qu'il fit, sans rechigner, sachant qu'il n'avait cependant pas dit son dernier mot.
***


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