cinq livres

cinq livres

dimanche 15 février 2015

fable pour adultes # 3 - Les mots d'un père (page 1)


Les mots d'un père

Quand Liliane, employée de la Résidence 'Le Paradis Sur Terre' frappa à la porte de Monsieur Beauchamp, il n'y eut aucune réponse. Cela était plutôt surprenant, puisque tous les matins, lors de son passage, la porte était toujours entrouverte et que le vieil homme, levant le nez du livre qu'il était en train de lire, la saluait d'un simple hochement de tête. Elle cogna donc une autre fois, un peu plus fort cette fois-ci mais sans plus de résultat.

Elle fit quelques pas vers la chambre suivante mais finalement, elle revint devant la porte close, sourcillant devant cette situation non-habituelle. En prenant une grande respiration, essayant de repousser ce qui lui venait à l'esprit, Liliane fit une nouvelle tentative avec plus d'ardeur cette fois-ci. Mais encore une fois, il n'y eut aucune réponse.

Elle colla son oreille à la porte, sans rien y entendre. Elle sonda la poignée qui résista. Peut-être dormait-il simplement un peu plus tard ce matin-là se dit-elle, envisageant le mieux, mais elle n'arrivait pas à se convaincre de ce fait. Comme son malaise persistait, elle dû donc se résoudre à faire appel à la directrice des lieux, qui vint, quelques instants plus tard, elle aussi surprise par ce fait non-habituel, ouvrir grâce à son passe-partout, la porte de ce pensionnaire sans histoire.

Bien sûr, ce que les deux dames avaient pressentie se révéla exact: Le vieil homme s'était éteint durant son sommeil. Il reposait paisiblement dans son lit, les draps bien ajustés tout contre lui, leur assurant que ce passage s'était fait tout en douceur. La mort était venu le chercher sans qu'il n'ait à en souffrir.

Comme cela est de mise, il s'est ensuite mis en route les procédures habituelles à ce genre de situation. À la résidence, la nouvelle se répandit rapidement. Monsieur Beauchamp était un homme plutôt tranquille et il aimait sa petite routine mais tout le monde, employés comme résidents, se sentirent attristés par ce départ. Le silence régna plus qu'à l'ordinaire ce jour-là à la résidence.

***

Et puis la directrice dû téléphoner au fils de Monsieur Beauchamp pour lui apprendre la malheureuse nouvelle. Après une courte prière à l'intention du disparu, elle composa le numéro, compta le nombre de sonneries puis arrêta de respira lorsqu'on répondit. Elle était habituée à ce genre d'appel mais à chaque fois elle en était bouleversée. Prenant une grande respiration, elle annonça avec douceur ce qui devait être annoncé.

-Je vais prendre les dispositions nécessaires... murmura la voix à l'autre bout de l'appareil.

La directrice sentait bien la peine de l'homme mais elle devait poursuivre:

-Il faudra aussi penser à ramasser ses effets... vous comprenez...

-Demain... demain j'irai, répondit le fils attristé.

Voilà que ce fils devenait, à quarante-deux ans, orphelin. Une page importante de sa vie se tournait avec ce triste événement. Sa relation avec son père n'en était pas une de grande expansion mais le vieil homme allait lui manquer. Justement, c'était de cette tranquillité et de ce calme que le fils venait s'imprégner lorsqu'il visitait son père. Mais ces rencontres n'auraient plus lieu.

***


Aucun commentaire:

Publier un commentaire