cinq livres

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dimanche 16 décembre 2018

Le 'méchant gant' partie 4/4


Alors le 24 décembre au soir arriva. Tous les habitants sortirent de chez eux pour se retrouver sur la place publique du village. Ils entourèrent le grand sapin qui y avait été installé dans l’après-midi et dans lequel des milliers de lumières avaient été placées. Depuis la tombée du jour, il scintillait de mille feux et comme chaque année, c’était l’émerveillement pour tous.

La tradition voulait qu’en début de soirée, comme en ce moment-là très exactement, chacun sorte de chez lui et vienne ajouter une décoration à l’arbre. Un peu après dix-huit heures, ils se retrouvèrent donc nombreux autour du sapin. Le père de Napoléon s’inquiéta cependant quand il chercha son fils et ne le vit nulle part. La mère de Nathan interrogea sa mère, qui se trouvait à quelques pas d’elle, lui demandant si elle avait vu son fils. En fait, les enfants manquaient à l’appel. Mais avant que la panique ne gagne les habitants du village, on entendit des voix venir de plus loin.

-Excusez-moi… excusez-moi, disait Napoléon en tentant de franchir avec tous ses amis, la foule pressée tout autour de l’arbre illuminé.

Peu à peu les adultes ouvrirent un chemin pour permettre à leurs rejetons de gagner le centre de la place. Et tous remarquèrent un vieil homme que tenait par la main notre valeureux Napoléon. Dans sa main libre, l’inconnu tenait une boule faite de lierre savamment tressé. Le silence régnait sur la place et tout le monde se questionna sur l’identité de cet invité surprise parce que bien sûr, personne ne put s’imaginer que le ‘méchant géant’ soit si menu et pas du tout effroyable.

-Je vous présente mon ami, dit Napoléon en se tournant vers le vieil homme. Vous le nommez le ‘méchant géant’ mais aujourd’hui je peux vous dire que son véritable nom est Augustin.

Alors on entendit de OH! et des AH! de surprise mais personne n’osa ajouter quoi que ce soit. Napoléon, d’un geste, encouragea son ami à suspendre sa décoration à l’arbre. Puis des plus âgés aux plus jeunes, tout le monde s’exécuta, essayant de trouver une place de choix pour sa décoration.

Et c’est ce jour-là que les affreuses histoires sur le ‘méchant géant’ cessèrent. Comme ça ! Comme par magie… ou presque.
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Alors si un jour vous passez par ce petit village, vous remarquerez que les villageois n’aiment pas parler de tout ça. Ils ne comprennent pas comment tout cela a commencé, comment tout cela a pu se perpétuer au fil des ans, comment ils ont pu dire des choses si horribles sur un homme pourtant si gentil. Mais cela est du passé. Le vieil homme est maintenant toujours bien accueilli au village. Et les villageois sont toujours les bienvenues dans la montagne ou même chez le vieil homme.  Même s’ils ne peuvent pas encore l’avouer ouvertement, les adultes de ce village savent qu’ils se sont accrochés bien involontairement à une idée fausse et que cela a causé certains torts.

Napoléon, satisfait de son entreprise, est certain qu’ils en ont retenu quelque chose d’important.
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Un jour, plusieurs années plus tard, alors que le vieil homme et Napoléon prenaient place sur un banc installé récemment à l’orée de la forêt, celui-ci revint sur cette veille de Noël toute spéciale où Napoléon avait accompli l’impossible.

-Ceci est un miracle, dit-il en regardant, admiratif, tout autour de lui. Par ce que tu as accompli, ma vie s’en est trouvée transformée. Comment as-tu fait Napoléon?

Fier et heureux, sachant que dans tout cela il avait découvert une vérité qui lui servirait toute sa vie il dit :

- Il faut, au départ, être attentif et vigilent quant à ce que nous acceptons de croire, Augustin.

-C’est certain, mais… commença le vieil homme sans pour autant oser poursuivre, sachant qu’aucun des arguments qu’il soulèverait ne viendrait à convaincre son jeune ami.

-J’ai compris, continua le jeune garçon d’un ton un peu plus sérieux, que les idées faussent qu’on entretient se répandent, se propagent et contaminent tout. Elles creusent des fossés, construisent des murs, nous isolent et nous emprisonnent. Elles nous aveugles.  Elles nous rendent amers, apeurés et impitoyables.

Un peu triste, le vieil homme du admettre que Napoléon avait raison.

-Sous ce qui est faux, se cache une vérité qu’il faut déterrer et découvrir et il faut être prêt à y mettre les efforts nécessaires pour y arriver.

-Et pour chacun de nous, c’est quelque chose de plutôt difficile, admit Augustin qui, lui-même, avait entretenu des opinions pas très gentilles à propos des villageois.

-Modifier ou remplacer des idées nocives, des opinions rigides, de vieilles convictions, des croyances désuètes ou d’effrayantes rumeurs est un travail de longue haleine et difficile… mais possible. C’est en cela qu’il faut croire.

Napoléon sourit et fit un clin d’oeil à son ami.
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